A la recherche du grand Tiki, Marquises juillet 2021 (Par Philipe-André F. et Pierre F.)
Ou journal de bord de l’Aquatiki 3 à la découverte des Marquises.
Tels de nombreux voyageurs comme Herman Melville qui y passât, ou Gauguin et Brel qui y restèrent, ce voyage fût une découverte, voire une exploration, pour nombre d’entre nous.
Samedi 3 juillet, Papeete-Hiva Oa : Nous voici réunis dès potron-minet pour embarquer sur le vol vers Hiva Oa. Embarquement en ATR72 d’Air Tahiti pour un vol de 4h. La couche nuageuse m’inquiète car, dans ces îles, les équipements d’aides à l’atterrissage ne sont pas toujours de mise, la percée faite nous nous posons sans difficulté : Ouf ! les nuages étaient tout de même bien bas. Telle la chanson de Brel « La pluie est traversière, elle bat de grain en grain », c’est sous la pluie que nos hôtes Erwan et Julien, les guides de plongée, nous ont accueillis. Arrivée au port d’Atuona pour embarquer sur l’Aquatiki 3 où nous attendait Manutaia, notre hôtesse de la croisière précédente, et Thierry, notre skipper pour ces deux semaines. Le départ étant prévu pour le lendemain, l’équipage nous propose une première excursion, l’annexe nous dépose à quai, repart puis… revient ! Premier oubli : les clefs du 4×4 ! Visite d’un site archéologique et de son Tiki. Ensuite nous descendons vers le cimetière d’Atuona pour découvrir les sépultures de Paul Gauguin et Jacques Brel.
Dimanche 4 juillet, matinée de navigation Hiva Oa-Moto Tani (Motane) : Le temps nous fait abandonner l’objectif initial de Tahuata et nous cinglons vers Moho Tani (ou Motane), une île inhabitée qui fait partie de la commune de Hiva Oa. Le site n’a pas encore été visité par des plongeurs ! Il est décidé d’explorer la pointe de la baie où nous mouillons. A 13h, la première palanquée se met à l’eau. Découverte d’un tombant tout le long de la pointe, d’une petite caverne, d’une faille, voilà pour le décor. Côté faune, de belles surprises : Requins gris, raies aigles, poulpes, et une grande diversité de poissons. Une seconde plongée, au couchant, offre un nouveau regard intéressant. Ce site n’étant pas encore répertorié, une réunion au sommet, réunissant équipage et passagers, décide de le nommer « Pointe Arc En Ciel ».
Lundi 5 juillet : De bon matin la palanquée 2 fait 2 plongées sur ce site et la palanquée 1 une seule. Confirmation que ce site PAEC est un bon spot de plongée et qu’il fera dorénavant partie des sites renseignés d’Aquatiki. Après-midi de navigation vers Tahuata, la météo semblant plus favorable.
Mardi 6 juillet, Moho Tani-Tahuata : Plongée sur la Pointe Teohatereie, un superbe tombant le plus au sud de l’ile. La plongée se finit dans une grotte très accessible où nous dérangeons une dizaine de requins, deux raies et quelques dizaines de langoustes d’une très belle taille. Globalement, les sites sont très peu plongés, peu cartographiés et nous irons de découverte en découverte. La faune n’est étonnamment, ni hostile ni farouche et c’est magique de pouvoir les observer si proches ! Mais toujours pas de Tiki. Durant notre déjeuner, notre capitaine Thierry notre capitaine déplace le voilier, non loin de là, vers la Pointe Anaete où une petite baie nous offrira un mouillage plus protégé. Vision paradisiaque que cette baie cernée de pentes boisées et offrant deux petites chutes d’eau à ravir les bateaux d’antan… Coté plongée, les alentours de cette Pointe Anaete offrent deux superbes sites : décor toujours aussi beau, tombant avec un plateau, nouvelle grotte… Une raie mouchetée passe et repasse : on se demande qui observe l’autre. Nos guides, Erwan et Julien, sont fort étonnés de la bonne visibilité générale. Lors de précédentes visites, en décembre janvier, les conditions extérieures étaient meilleures mais la visibilité sous-marine plus réduite.
Mardi 7 juillet : La plongée du matin se fera sur le site nommé « La grotte sans fond ». Le briefing présente une grotte longue et profonde qui offre un accès à une petite cavité par un couloir autorisant seulement deux plongeurs. Mais…Surprise ! La réalité de 2021 n’est plus celle de 2016, la grotte à un fond… Les sédiments se sont accumulés et on ne trouve même pas l’entrée de cette cavité secondaire. Aucune déception car la plongée est tout même riche avec une faune très variée. Surtout, devant la grotte, les Mantas sont présentes : Pas farouches, elles nous passent à côté comme si nous n’existions pas. L’après-midi plongée dans la baie Anaete où nous mouillons depuis la veille au soir. Plongée moins profonde mais toujours aussi belle agrémentée de la visite d’une Manta géante. Une belle surprise pour Pierre qui n’avait jamais vu de Manta d’une telle envergure ! Retour direct au catamaran qui permet le palier de sécurité dans des eaux peu profondes au-dessus d’un plateau présentant de très beaux coraux avec un petit aspect champignonnesque style « maison de Schtroumpfs ». Cerise sur le gâteau lorsque notre capitaine descend la plate-forme hydraulique : On n’a plus qu’à s’asseoir, l’eau à la taille et se laisser remonter par ce luxueux accessoire : Pas d’effort après la plongée !
Jeudi 8 juillet, Tahuata-Hiva Oa : Plongées matinales sur la Pointe Matehoke, afin de pouvoir retourner sur Hiva Oa récupérer quelques colis livrés tardivement et compléter l’avitaillement. Un très beau site plein de vie, un vrai aquarium. Retour vers Hiva Oa par le canal du Bordelais avec un vent contraire et une houle de 2 à 3 mètres : Un moment pénible pour ceux n’ayant pas le pied marin. Arrivée en fin de journée au mouillage. Notre grand et superbe catamaran domine la baie et les quelques voiliers avoisinants…
Vendredi 9 juillet, Hiva Oa-Tahuata : Matinée consacrée à la visite du musée Gauguin, de l’espace Brel et du marché artisanal pendant que l’équipage complète l’avitaillement. Aucun original de Gauguin, évidemment, mais une série de bonnes reproductions qui permet une intéressante rétrospective. L’espace Brel est un hangar présentant son avion et quelques panneaux d’informations en piètre état. Vers 11h30 levée de l’ancre et retour rapide vers Tahuata. Les vents nous sont plus favorables, la houle moins forte, ce qui rend la traversée plus rapide. Cela autorise une plongée et l’annexe part au-delà de la pointe avec une palanquée. Juste avant la mise à l’eau, heureusement !, le moteur cale pour ne plus redémarrer… La VHF crépite « Aquatiki, Aquatiki, Aquatiki, Thierry pour Julien. Aquatiki, j’écoute. Moteur de l’annexe en panne. Le bonitier aperçu dans la baie est-il toujours là ? Pourrait-il venir nous remorquer ? ». Suspens… Pendant que les plongeurs palment pour essayer de mettre l’annexe à l’abri, Julien palme du catamaran vers le bonitier qui accepte de nous porter secours. Sans VHF sur l’annexe, ni bonitier dans la baie, nous étions mal partis, Thierry (sur l’annexe) étant le seul à même de manœuvrer le catamaran. Explication : le moteur essence de l’annexe avait été gavé de diesel… On comprend mieux son indisposition… Pendant que la palanquée de rescapés plonge à proximité, le hors-bord sera siphonné par Julien, gorgé d’essence et il finira par redémarrer permettant à la seconde palanquée de plonger sur cette pointe Matatehoke. La suite de la croisière ne sera pas compromise. Ouf !
Bel aquarium que cette pointe (presqu’une habitude aux Marquises) avec, en prime, 4 Mantas, deux très grandes et deux plus petites, ainsi qu’un requin Tapete.
Samedi 10 juillet, le matin plongée sur le Motu Oio, très beau tombant avec un mur de murènes. Elles sont si nombreuses qu’on les filme plusieurs minutes en passant de gueule en gueule, parfois plusieurs dans la même cavité mais toujours accompagnées de leur crevette nettoyeuse. Nous repérons une faille dans le tombant et nous nous y engouffrons. Après avoir dérangé 4 requins gris, des dizaines d’énormes langoustes s’offrent à nous, sans crainte et quelques-unes en pleine eau. La plongée de l’après-midi se fera dans un site trouvé par Julien en janvier précédent : il sera donc baptisé « La grotte à Juju ». Deux très jolies grottes à nouveau occupées par requins et langoustes ! Néanmoins, l’un d’eux attire particulièrement notre attention. Un requin gris se trouve posé sur le fond, immobile et cela nous interroge. Normalement, pour respirer, ce type de requin doit nager pour alimenter ses branchies… Est-ce une mutation ? Ou le courant dans la grotte est-il suffisant pour l’alimenter ?
Dimanche 11 juillet.
Petit tour à terre pour assister à la messe dominicale et faire quelques beaux achats au petit marché artisanal. Un bel autochtone au corps musculeux et entièrement tatoué s’offre gentiment… à nos objectifs. On s’éloigne un peu du village pour effectuer deux nouvelles plongées sur la Pointe Anaete avant de revenir pour une soirée spéciale consacrée à l’anniversaire de notre gentil organisateur Denis. Manutaïa nous a préparé des langoustes qui seront grillées sur le barbecue du bateau, sa nièce et une copine nous offrent un joli moment de danses Marquisiennes. Une joyeuse soirée pour aider notre ami Denis à passer une nouvelle demie-décennie.
Lundi 12 juillet, Ua Huka-Nuku Hiva : Plongées matinales sur l’îlot Mokai à Ua Huka qui présente une faune très diversifiée et l’après-midi au Motutokatai, un véritable aquarium de pleine mer.
Mardi 13 juillet : Nouvelles plongées près l’ilot Mokai. On y observe des Raies Mantas et Mobulas, et l’après-midi une Raie Pastenague en plein dans le bleu. Grand plaisir : A chaque voyage des palanquées, de nombreux dauphins nous escortent et jouent autour de l’annexe multipliant les sauts. Ils sont si nombreux qu’au retour, nous ne résistons pas à une mise à l’eau pour les observer en PMT.
Nos plongées quotidiennes effectuées, le catamaran met les voiles (et le grand Spinnaker rouge, impressionnant) vers l’ile de Nuku Hiva, chef-lieu des Marquises.
Mercredi 14 juillet, Nuku Hiva- : Toujours pas trouvé de Tiki mais on nous assure ce sera le jour ! Deux plongées au Cap Martin, lieu-dit Tikapo. Plongée relativement technique, car c’est un tombant qui offre des plateaux à 25 et 34 mètres avec un courant soutenu. La houle est souvent bien présente rendant la remontée en annexe très, très inconfortable et porteuse de risques. Le briefing est donc précis concernant le retour à l’annexe : en file indienne, on se tient à la poignée de la bouteille du précédent, on décapèle vite, on passe son matériel et on remonte sur l’annexe sans traîner. Tel est le prix à payer pour espérer voir le Tiki… Superbe plongée du matin. Cette pointe regorge de poissons, des milliers, par bancs entiers. Une escadrille de raies aigles passent entre les requins gris, nos regards ballaient de tous les côtés. Superbe spectacle mais… pas de Tiki ! La plongée de l’après-midi nous réserve une surprise. Le courant s’est inversé et les deux palanquées s’égarent dans le grand bleu avant de retrouver le tombant. Plongée riche, similaire à celle du matin, mais… toujours pas l’ombre d’un Tiki… En cet après-midi de 14 juillet, quelques-uns iront jusqu’au village attirés par les sons de la fête. L’accueil est amical comme souvent en Polynésie et les Marquisiens sont réputés pour leur gentillesse. Ambiance bon enfant : Après les parties de boules, les différents concours de tir à la corde et autres jeux, la Hinano (bière locale) semble avoir profité à certains plus qu’à d’autres… Mais le sourire est là qui désarme des regards sombres… de curiosité et timidité dont l’agressivité est bien absente.
Jeudi 15 juillet : Nuku Hiva : Tikapo nous a bien plu et nous y retournons ! La première palanquée est en train de se régaler lorsqu’apparaît une masse sombre…Majestueux dans sa solitude apparaît… notre Tiki ! Enfin, ce fameux et invisible Requin-Marteau, le voici, qui s’est fait tant attendre… Il passe quelques instants puis s’éloigne dans le bleu. L’émotion n’interrompt pas la plongée d’autant qu’à 34 m, au bout du plateau, une escadrille de 14 raies aigles apparait si lentement qu’elles semblent presque faire du surplace… Le temps et le mouvement semblent s’arrêter quand soudain resurgit des abysses le Requin-Marteau qui avance droit vers les raies… Auront nous droit à une prédation ? Non, le seigneur repart vers le bleu… Et l’air, les ordinateurs, nous rappellent qu’il est temps de penser à remonter… mais nous l’avons vu !
Nous quittons le Cap Martin pour rejoindre la Baie de Aotupa, première ville des Marquises. La Baie est gardée par deux hauts îlots nommés Les Sentinelles. Nous effectuons nos dernières plongées sur la Sentinelle Est. Plongées très différentes des précédentes car la visibilité est assez faible, de 3 à 5 m dans une eau très verte. Les conditions ne sont pas optimales et pourtant c’est à cet endroit que nous verrons le plus de Requins-Marteaux, 5 de manière fugace pour une palanquée, vision beaucoup plus massive au plaisir de la seconde qui en dénombra une petite vingtaine qui, surprise de la présence de ces bulleux, se divisa en partie haute et basse pour éviter une collision qui aurait nourri doutes et débats… Pour clore par avance ceux-ci, la soirée fut consacrée à une séance vidéo sur le grand écran de notre luxueux catamaran pour comparer nos expériences, et, mine de rien, compter les marteaux des uns et des autres… Non, mais !
Vendredi 16 juillet, sur l’Ïle de Nuku Hiva : Journée sans plongée car veille de vol, journée découverte de l’île en 4X4. Françoise, femme de caractère, nous accueille tel un général de brigade et, soucieuse de l’emploi du temps (et du RV au restaurant) essaie de nous mettre au pas via un démarrage rapide… Mais certains lui rappellent que nous sommes en vacances et que l’on va se… la jouer cool ! Après cette mise au point, Françoise se révèle une guide rugueuse mais fort sympathique, avec ses 25 ans sur l’ile et une étonnante connaissance de la flore, de la rare faune et de l’interprétation des Marae. Déjeuner dans une baie idyllique souvent prise en photo pour les dépliants de tourisme.
Samedi 17 juillet, Nuku Hiva-Papeete : La pluie est au rendez-vous, c’est la saison. Mais abondante, continue et accompagnée de rafales venteuses, elle semble inquiétante pour l’atterrissage sur un petit aéroport pas au top de la technologie…
Quelques inquiétudes quant à l’arrivée de notre avion mais aucun souci, il se pose toujours à Nuku Hiva ce qui n’est pas toujours le cas à Hiva Oa. Une petite heure de retard, embarquement sous l’averse, vol sans problème et arrivée à Faa’a (Aéroport de Tahiti-Papeete) en milieu d’après-midi. Moments des séparations, adieux et embrassades diverses car certains repartent dès le lendemain matin vers l’hexagone quand d’autres privilégiés restent encore quelques jours sur Tahiti, voire une semaine sur les îles de la Société (Bora ou Raiatéa et Taaha, l’île Vanille).
Tout le monde a apprécié cette quinzaine aux Marquises et la formule Catamaran qui offre mobilité, confort et sécurité (Nitrox, liaison satellite, GPS et radio sur zodiac et voilier, etc…). Nous avons bénéficié d’une visibilité privilégiée, nous n’avons pas eu à trop souffrir des pluies saisonnières, les fonds sont intéressants, diversifiés, avec de belles grottes sympathiques aux sols jonchés de coquillages (principalement de porcelaines de belle taille) et nous avons joui de superbes rencontres avec une faune étonnamment placide et peu peureuse face à notre intrusion. Cette sortie sera reprogrammée dans deux ou trois ans, toujours en lien avec celle sur les Tuamotu mais plus tôt dans la saison (bien avant et non après la pleine lune de juin et le rendez-vous libidineux de nos amis les Mérous à Fakarava).
Laisser un commentaire
Vous devez être identifié pour poster un commentaire.